Nous prenons aujourd'hui la parole pour faire part de notre inquiétude concernant la pérennité du droit à
la vie privée et à la confidentialité des communications. Le collectif, en accord avec le positionnement de
la Quadrature du net,¹ exprime son opposition aux mesures de la proposition de loi « narcotrafic »
élargissant les pouvoirs de surveillance. Nous alertons en particulier sur l'élargissement de l'usage de «
boites noires », analysant en direct tous les échanges sur Internet. Nous appelons à la vigilance
concernant l'obligation pour les fournisseurs de services de messagerie d'affaiblir les protocoles de
chiffrement, via l’introduction d’une porte dérobée (backdoor) ou d'un destinataire fantôme.² Nous
espérons que cette dernière mesure, votée par le Sénat puis rejetée par l'Assemblée nationale, ne sera pas
réintroduite.
Sous le prétexte légitime de lutter contre le narcotrafic, ces mesures sapent le secret des correspondances
pour tout le monde, droit pourtant garant de nos libertés individuelles et collectives. Il y a presque 10 ans,
l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) défendait déjà l'idée que créer des
backdoors pour lutter contre le terrorisme était dangereux pour la sécurité.³
Il est impossible de garantir que ces capacités ne soient pas abusées par des personnes où des entités
malveillantes. Par exemple, fin 2024 aux États-Unis, le piratage de système d'écoutes légales chez de
grands opérateurs a permis à une puissance étrangère d'avoir accès à des communications sensibles,
poussant des officiels du FBI et CISA à recommander l'utilisation de messageries chiffrées. 4
Ces dernières années, de nombreuses entités publiques et privées d'envergure ont été dans l'incapacité
d’empêcher des fuites de données massives, quand ces dernières n'ont pas tout simplement vendu ou
transmis ces données volontairement. Celles-ci se retrouvent dès lors sur le marché noir et alimentent les
réseaux criminels, les géants du numérique et les États tiers.
Ainsi, la balance bénéfice-risque de la collecte de données, et qui plus est d'un silo de données, ne doit
pas seulement être évaluée au présent, mais en considérant aussi les abus futurs, et le contexte
géopolitique.
Nous comprenons fort bien que l’État souhaite renforcer ses moyens pour lutter contre le narcotrafic,
mais nous pensons que la solution envisagée est susceptible de détruire plus de vies qu'elle n'en sauvera.
Si cette loi est adoptée, elle va intensifier la surveillance au détriment du droit au secret de la
correspondance.
En conséquence, nous demandons à nos élu⋅es de ne pas voter la proposition de loi telle qu’elle a été
validée par le Sénat et de refuser la mise en place de ces dispositifs.
Le collectif CHATONS (https://chatons.org).
¹ Appel de La Quadrature du Net : https://www.laquadrature.net/narcotraficotage/
² Article NEXT du 5 mars 2025 : https://next.ink/173899/narcotrafic-bruno-retailleau-veut-un-fantome-
dans-les-echanges-chiffres/³ Article Libération du 2 août 2016 : https://www.liberation.fr/france/2016/08/02/controler-le-
chiffrement-un-calcul-difficile-pour-le-gouvernement_1469978/
⁴ Article NBC News du 3 décembre 2024 : https://www.nbcnews.com/tech/security/us-officials-urge-
americans-use-encrypted-apps-cyberattack-rcna182694
